Pourquoi et pour quoi partir?
Le but de ce voyage n’est pas de réaliser une performance ou un exploit. Cela fait bien longtemps que Mermoz a traversé à pied la Cordillère des Andes, que les cités perdues des Incas ont surement toutes été trouvées, que Tintin a résolu la malédiction de la momie de Rascar Capac et également retrouvé l’Oreille cassée. Et les tribus perdues d’Amazonie ont bien mérité de rester tranquilles encore quelques siècles…
Depuis un peu plus de 10 ans, au grès des différentes affectations (et des déménagements associés), nous avons pu faire et défaire de nombreuses fois nos cartons. Quitte à les défaire sans avoir la certitude qu’ils ne seraient pas à refaire moins d’un an après. Ces 10 années, ont été marquées et rythmées par les multiples départs et absence. Si ces derniers restent liés à des choix professionnels assumés, ils n’en demeurent pas moins pesants et le besoin de se retrouver, ensemble, en famille, s’est particulièrement fait ressentir ces derniers temps.
Si les multiples années de scoutisme nous avaient mis à bonne école, c’est en marchant, plusieurs étés, sur les chemins de St Jacques avec 2 ânes (et d’abord 3 puis 4 mules…) que nous avons expérimenté les voyages simples, pour lequel l’imprévu peut être tant une contrainte qu’une magnifique opportunité. Et dans ces situations, les enfants nous ont toujours surpris par leur résilience et leur adaptation.
Nous nous sommes aussi, et surtout, bien rendu compte que notre époque incite à ne pas s’arrêter, à courir toujours après quelque chose. Que ce soit le temps, le métro (mais qui dans tous les cas sera suivi par un autre quelques minutes plus tard…), le programme des prochaines vacances. Voir même derrière quelque chose que nous n’arrivons finalement pas à définir. Mais peu importe, tant que l’on court.
Aussi, le but de ce voyage est simple :
Prendre le temps.
Prendre du temps ensemble,
Prendre du temps pour nos enfants,
Prendre le temps de découvrir d’autres modes de vie et d’autres pays,
Prendre le temps de rencontrer autrui,
Prendre le temps de se tromper de chemin, de revenir en arrière et de repartir motivés,
Prendre le temps de perdre du temps
Mais surtout, prendre le temps de prendre le temps.
La fin de notre passage à la Réunion marquera surtout la fin d’un chapitre. A l’issue, Benoît retrouvera les bancs de l’école et une certaine stabilité, les longues absences seront plus rares. Et Alice rentrera dans des classes qui comptent. Ce projet de voyage au long cours nous faisait rêver depuis des années. Le dilemme était simple : saisir cette occasion et partir, ou reporter à plus tard, mais sans tous les enfants. Le choix en fut d’autant plus rapide. Quelques dispositions à prendre (vive le congé parental dans une administration moderne) et nous voilà partis.
Cela nous permettra de revenir pleins d’énergie et de motivation, que nous pourrons alors allègrement utiliser, de retour à Paris pour courir à nouveau derrière le temps qui, lui, n’aura pas cessé de filer…
En somme, un voyage simple dans ses ambitions, mais ambitieux dans ses objectifs.
Ô temps, suspends ton vol ! et vous, heures propices, suspendez votre cours ! Laissez-nous savourer les rapides délices des plus beaux de nos jours !
Alphonse de Lamartine